Ils arrêtent leur droit pour commencer en économie, quittent les bancs de médecine pour la biologie ou filer vers un BTS
en espérant y couler des jours meilleurs. Depuis quelques semaines, c'est un peu la saison des transferts à la fac. Pour la première fois en effet, certaines universités donnent à leurs étudiants
la possibilité de se réorienteren cours d'année,
s'ils sentent qu'ils se sont trompés de voie ou s'ils commencent à décrocher. Cette prestation est l'une des mesures phares du plan Réussir en licence, lancé il y a deux ans pour endiguer le taux d'échec vertigineux (un sur deux !) des étudiants en 1re année de licence.
Pour beaucoup d'entre eux, le parcours se délite à peine après avoir débuté. De cours manqués en motivation perdue, les semaines s'égrènent jusqu'au crash final des examens de janvier. A moins d'un sursaut improbable, l'année est perdue. C'est justement ce temps gaspillé que les réorientations permettent en partie d'éviter.
A l'université de Saint-Quentin (Yvelines), on lutte contre cette fatalité en aidant des jeunes mal partis à changer de cap au milieu de l'année, avant qu'il ne soit trop tard. « Le tout, c'est de repérer les décrocheurs suffisamment tôt pour trouver ensemble une solution plus adaptée », explique Danielle Arnold, qui y dirige la Drip (direction de la réussite et de la réinsertion professionnelle). « En sciences, le dispositif est bien rodé. Dès qu'un étudiant a raté trois TD (travaux dirigés), la Drip est au courant et nous le contactons. » D'histoire à sociologie, de droit à staps (sport), voire d'éco à un BTS hôtellerie? 40 étudiants de Saint-Quentin ont ainsi changé de filière entre le premier et le second semestre. « A terme, on espère arriver à 200 », poursuit Danielle Arnold.
Aujourd'hui, seules une quinzaine d'universités (sur 85) proposent une réorientation, «mais elles sont appelées à se généraliser », promet-on dans l'entourage de Valérie Pécresse, la ministre de l'Enseignement supérieur. «Mais ces parcours bis sont assez compliqués à mettre en place, car il faut trouver des solutions au cas par cas. »
Ce travail de couture, Aix-Marseille- III l'a inauguré cette année en y consacrant 1,5 million d'euros. Depuis un mois, de très nombreux étudiants jouent les oiseaux migrateurs, troquant par exemple leur 1re année de licence scientifique à la fac pour des formations « professionnalisantes » (BTS ou IUT). Ici, on n'hésite pas à concocter un second semestre surmesure, ponctué de soutien individuel intensif et de cours de méthodologie pour permettre aux « repêchés » de se remettre à niveau dans leurs nouvelles matières. Le président, Marc Péna, qui a fait de ce dispositif seconde chance une priorité, amême fixé un objectif : « Si on parvient à sauver 10 % de ceux qui décrochent en leur offrant un second semestre mieux adapté, ce sera formidable ! »
Charles De Saint Sauveur
Article publié dans leParisien du 3 Mars