Stages ouvriers : une première expérience pour les élèves ingénieurs

La formation d’ingénieur comprend un stage de 1re année au poste d’ouvrier. Cette expérience pour les futurs cadres est un moment d’apprentissage unique : une leçon d’humilité, de solidarité et de légitimité...

Stages ouvriers : une première expérience pour les élèves ingénieurs

    Dans les grandes écoles, la mise en situation débute dès la 1re année. Ce stage initial est singulier pour de futurs cadres, voire dirigeants : il s’agit d’expérimenter la position d’exécutant.

    Dans les écoles d’ingénieurs, les élèves enfilent le bleu de l’ouvrier durant un mois. Une connaissance du terrain indispensable à leur formation.

    Un travail de production

    « Cette expérience peut porter différents noms : stage d’exécution, ouvrier, de découverte, d’exécutant »

    , note Claudine de Vaux Bidon, responsable des stages à ESME Sudria et chargée du groupe de travail des stages de CGE (Conférence des grandes écoles). « Elle permet de découvrir le fonctionnement de l’entreprise, de l’équipe, la hiérarchie, la ponctualité, les codes de l’entreprise », précise-t-elle.

    Ainsi, le stage exécutant des Arts et métiers ParisTech est important dans une formation axée sur la pratique du métier d'ingénieur, « celui qui fait faire, précise Laurent Champaney, directeur adjoint chargé de la formation. Nous demandons aux élèves de se placer dans un rôle d'observateur et de faiseur. »

    Pour Nadia Couturier, responsable des stages de l'Ecole centrale de Lyon, l'idéal est de réaliser « un travail manuel sur une chaîne de production dans une structure où évoluent des ingénieurs ».

    Comprendre les opérateurs pour mieux les encadrer

    « Nos élèves qui seront demain en position d’encadrement, de conception de produits assemblés par des opérateurs, ont beaucoup à apprendre d’une expérience d’ouvrier, assure Jean Le Guen, responsable du département des relations entreprise et des stages de l’école des transports Estaca. En se glissant dans la peau d’un opérateur, ils assimilent ses contraintes et sauront s’en souvenir une fois ingénieurs. » Un manageur qui sait de quoi il parle comprend la situation de travail de son employé, gagne en légitimité. Les élèves de l’Estaca se frottent à une ligne d’assemblage automobile, un garage, un aéroclub, un centre de maintenance ferroviaire; ils construisent, assemblent, démontent, réparent.

    A l’Ecole centrale de Lyon, l’objectif du stage d’exécution est triple

    : découvrir le fonctionnement de l’entreprise, la nature des travaux d’exécution et des relations entre opérateurs et cadres. « Nos élèves vivent pour la première fois l’appartenance à un groupe de travail, précise Nadia Couturier, ils tissent des relations et apprennent au contact d’ouvriers seniors. »

    Ce stage, souvent le premier contact avec l’entreprise, est une expérience à indiquer sur le CV et l’occasion d’être évalué par un professionnel, son maître de stage. « Ils reviennent plus débrouillards, note Claudine de Vaux Bidon. Ils ont acquis une dimension professionnelle. »

    Un peu d’humilité

    Le stage ouvrier a aussi des vertus en termes de valeurs pour Jean Le Guen. « Découvrir qu’il faut du temps pour apprendre le métier d’un opérateur, que le travail à la chaîne demande une grande concentration et est fatigant, considérer la solidarité sur ce terrain, c’est une leçon d’humilité ! Une fois ingénieurs, ils ont le respect des ouvriers. » Pour Laurent Champaney, cette expérience du management « à l’envers est un apprentissage humain sur un terrain éloigné de leur univers habituel. »

    Une réflexion sur l’entreprise

    « Je leur dis souvent : Soyez un ouvrier mais avec un cerveau de futur ingénieur ! raconte Claudine de Vaux Bidon. L’objectif est de travailler tout en ayant une réflexion sur les apprentissages, les relations humaines, les contraintes techniques. »

    Il est demandé aux élèves de rédiger un rapport et parfois de le présenter devant un jury, voire devant la promotion comme à l'Estaca et à Centrale Lyon. « Chacun fait ainsi bénéficier aux autres de son expérience, de son vécu du management, des problèmes rencontrés », explique Nadia Couturier.

    Témoin - « Etre allée sur le terrain m’a procuré de la légitimité »

    Alizée BERNARD, 20 ans, élève à l'Estaca

    Comment considérez-vous le stage ouvrier en tant que futur ingénieur ?

    Ma passion de l’automobile m’a conduite à intégrer l’Estaca, école de référence du secteur. Attirée par la course, je souhaite devenir ingénieur en compétition. Pour cela, j’ai besoin d’être calée en mécanique et réglages. Le stage ouvrier est un moment idéal pour mettre les mains dans le cambouis !

    Où avez-vous réalisé vos deux stages ?

    Le cursus à l’Estaca se fait en cinq ans. On peut donc réaliser deux stages ouvriers, l’un en 1re et l’autre en 2e année. Je les ai chaque fois trouvés par relation. Le premier grâce à mon kiné qui m’a parlé d’un garage Porsche dont le patron participait à des rallyes classiques. Ils n’avaient jamais pris d’élève-ingénieur, je les ai donc convaincus de travailler auprès du motoriste. J’ai réalisé mon second stage avec le père d’un camarade de classe qui a une écurie de GP2 (catégorie de voitures de compétition monoplaces) au Luxembourg. J’ai même eu la chance de pouvoir participer à deux courses.

    « Pour devenir ingénieur en compétition, j’ai besoin d’être calée en mécanique et réglages »

    Qu’avez-vous appris ?

    Surtout de la technique. C’est un atout d’avoir été sur le terrain, de savoir faire les choses soi-même pour devenir ingénieur en compétition et avoir toute légitimité auprès des mécaniciens, pouvoir apporter des améliorations. Cela m’a aussi permis de me créer un réseau dans le milieu. Ces expériences confirment mon projet professionnel. J’ai d’ailleurs déjà trouvé mon stage de 3e année chez Renault F 1 en qualité de technicienne en métrologie !

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    Dossier réalisé par Ariane Despierres-Féry

    en partenariat avec Le Journal des Grandes Ecoles

    Article paru dans le supplément éco du Parisien daté du lundi 25 mars 2013

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