Emploi - "le secteur de la construction connaît une pénurie de personnel"

Une femme dans le BTP - Interview d'Hélène Grimault-Duc, Directrice de l’ESITC Caen. Découverte d’une femme pas comme les autres.

Emploi - "le secteur de la construction connaît une pénurie de personnel"

    Conducteur de travaux, ingénieur d’études, ingénieur méthodes, responsable planning, chef d’entreprise, formateur, consultant en ingénierie… voici le portrait d’Hélène Grimault, la directrice de l’ESITC de Caen, une école d’ingénieurs spécialisée dans le BTP. A elle seule elle illustre un paradoxe bien français : le secteur est encore peu féminisé et les directions des grandes écoles sont trustées par les hommes. Découverte d’une femme pas comme les autres.

    On manque d'ingénieurs en France, c'est encore le cas dans le bâtiment ?

    Oui, le secteur de la construction connaît une pénurie de personnel d'encadrement. Le domaine de la construction est un domaine qui a beaucoup évolué ces dernières années.

    Des besoins en compétences ont émergé pour répondre à de nouveaux chantiers et à de nouveaux enjeux tels que l’impact environnemental des bâtiments, accessibilité, valorisation des déchets, économies d’énergie… Que ce soient des ingénieurs travaux pour manager les équipes sur les chantiers, des ingénieurs commerciaux ou des ingénieurs d'études techniques,

    les grands noms du BTP comme les petites et moyennes entreprises recrutent des ingénieurs

    . Il est d’ailleurs assez surprenant de constater un manque de volontaires pour les formations d’ingénieur. Ce sont pourtant des voies passionnantes et gage d’emploi. La grande majorité de nos diplômés sont embauchés avant la fin de leurs études !

    Pourquoi c'est encore un secteur trop peu attractif alors que les perspectives de carrière sont bonnes ?

    Nous ne ressentons pas ça! L'image de la construction s'est bien améliorée ces dix dernières années, notamment auprès des jeunes. L'émergence de nouvelles technologies, l'usage des outils de simulation numérique, une place croissante à l'innovation et la révolution verte y sont sans doute pour quelque chose. Peut-être que certains parents sont restés sur une image d'Epinal du BTP mais les métiers de la construction ont beaucoup évolué, ils sont vivants, passionnants, épanouissants ! Je crois que le niveau de responsabilité, associé à des perspectives d'évolution de carrière et des salaires plus que corrects, contribuent également à faire évoluer l'attractivité des métiers du bâtiment et des travaux publics. Il me semble que si le métier est encore trop peu attractif il faut en chercher la raison davantage autour d'un manque d'information sur les formations et carrières scientifiques en général. Le plus grand nombre sait ce que fait un médecin, un enseignant, un informaticien, alors que les métiers d'ingénieurs ne sont pas connus. Je pense qu'il y a un réel travail d'information à mettre en œuvre pour faire connaître ces opportunités aux collégiens et aux lycéens.

    Faudrait-il plus de grandes écoles du bâtiment ?

    Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de créer de nouvelles grandes écoles. Celles qui existent sont très performantes et elles sont en mesure de répondre au besoin du secteur par leur capacité d’accueil. De telles formations spécialisées nécessitent un vrai savoir-faire, une réelle expertise. Le risque, en créant de nouvelles options dans des écoles généralistes, est de faire du saupoudrage et d’abaisser le niveau technique pour la spécialité des jeunes entrant sur le marché du travail. Mieux vaut selon moi continuer à perfectionner et optimiser les formations existantes.

    Les filles : elles s'éclateraient aussi dans ce secteur ?

    Bien sûr que les filles s'éclatent dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics ! Les métiers sont riches et passionnants. Beaucoup de métiers sont moins physiques qu'ils ne l'ont été par le passé et de nombreux postes sont compatibles avec les contraintes de vie de famille. Aujourd'hui les jeunes femmes représentent 24% de nos élèves-ingénieurs au sein de l'ESITC Caen et je peux vous assurer qu'elles sont passionnées par le chantier autant que par le bureau des méthodes. A la sortie les entreprises leur proposent même d'emblée des postes de plus en plus variés : l'efficacité des équipes mixtes, composées d'hommes et femmes proposant des visions complémentaires, n'est plus à prouver !

    Une femme à la tête d'une école ? Encore une exception? Pourquoi ?

    Je travaillais comme ingénieur dans le domaine du BTP quand Serge Eyrolles alors directeur de l'ESTP (qui m'avait repérée lors de mes études) m'a sollicitée pour créer et diriger ce qui est ensuite devenue l'ESITC Caen. C'était il y a déjà vingt ans. Finalement, le secteur du BTP, que l'on dit être un univers très masculin, a su être avant-gardiste sur ce point ! Même si c'est de moins en moins exceptionnel, il est vrai que les femmes à la tête d'une école sont encore trop peu nombreuses. Comme sont encore trop peu nombreuses les présidentes d'université et les chefs d'entreprises femme. Heureusement dans tous les secteurs les choses évoluent...

    Propos recueillis par Gilbert Azoulay

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