"Il manque 10 000 ingénieurs par an !"

Interview Christian Lerminiaux, Président de la CDEFI (Conférence des directeurs d’écoles françaises d’ingénieurs) nous dévoile sa vision des ingénieurs made in France, leur rôle à jouer dans la crise, et le rôle des écoles d'ingénieurs...

"Il manque 10 000 ingénieurs par an !"

    A l'heure de la réindustrialisation de la France, les ingénieurs français sont mobilisés et très demandés... dans le monde entier ! Christian Lerminiaux nous dévoile sa vision des ingénieurs made in France, leur rôle à jouer dans la crise, et le rôle des écoles d'ingénieurs...

    Les Ecoles d’ingénieurs françaises ont-elles des moyens suffisants pour être au niveau des meilleures universités mondiales ?

    Avec les moyens dont nous disposons, nous avons démontré l'excellence des formations d'ingénieurs. On s'arrache nos diplômés, partout dans le monde. Un ingénieur français peut trouver un job n'importe où ! Comme il y a en plus une forte pénurie de talents, le marché est en extrême tension. Du coup, un ingénieur made in France qui voudrait aller aux Etats-Unis peut trouver sans problème un emploi ou être accueilli dans un laboratoire pour faire une thèse. Attention, je ne dis pas que nous sommes bons partout ! Nous sommes forts pour tout ce qui est conceptuel et recherche. Nous sommes moins réputés pour notre créativité.

    Pour revenir à la question des moyens, il est sans doute nécessaire de se mettre au standard en matière de recherche de haut niveau en direction des entreprises. Ces dernières devront être mises à contribution, d’une manière ou d’une autre pour faire face aux investissements massifs en matière d’équipement et de R&D. C’est indispensable si nous souhaitons nous comparer au MIT ou à Standford.

    Il est également nécessaire de maintenir l’effort budgétaire sur les écoles d’ingénieurs. Si nous voulons former les ingénieurs dont notre économie a besoin, nous devrons donc accroitre leurs ressources. Cela passe par une remise à plat du modèle économique. Mais la Nation doit également remplir son rôle en soutenant les établissements qui forment les actifs dont elle aura besoin demain.

    La France produit 31 000 ingénieurs par an. Selon vous, ces futurs ingénieurs vont-ils nous aider à envisager la sortie de la crise et une véritable réindustrialisation de la France ?

    Ces ingénieurs vont nous aider s'ils arrêtent de se focaliser sur les grands groupes. Il faudrait des PME plus fortes et des entreprises de plus de 500 salariés en plus grand nombre. Les ingénieurs ont la capacité de développer l'activité à condition qu'ils se dirigent vers ces PME, souvent innovantes, en province notamment. Quand on annonce des destructions d'emplois dans l'industrie, on ne supprime pas des postes d'ingénieurs. Au contraire ! Le entreprises recrutent nos ingénieurs pour innover et accroitre leur compétitivité. Il faut que les gens en prennent conscience !

    Le monde des écoles d’ingénieurs connaît un vrai paradoxe : il y en a un très grand nombre pour finalement peu de candidats. Sont-elles véritablement sélectives ?

    C'est vrai. Le nombre d'étudiants en classes prépas est inférieur au nombre de places dans les écoles d'ingénieurs. Notre concours est plutôt un système de classement mais pas d'élimination. Le nombre de candidats qui se dirige vers la formation d'ingénieurs est encore relativement faible car les études d'ingénieurs font encore peur parce qu'elles sont longues et difficiles. Je note tout de même que la situation s'inverse légèrement depuis trois ans. Le nombre de candidats aux écoles d'ingénieurs post-bac en 5 ans est en forte hausse : + 40%.

    Les écoles d’ingénieurs vont faire entendre leur voix à la rentrée 2012 : quels sont les grands chantiers ?

    Je reste persuadé qu’il faut 40 000 ingénieurs / an en France. Il en manque 10 000 ! Il faut donc mobiliser tout le corps social. On constate une certaine auto-censure dans les milieux défavorisés. Il semble clair que nous devrons ouvrir nos portes plus largement, avec une plus grande diversité et en augmentant bien entendu la proportion de filles. Nous devons passer de 25% à une totale équité : 50/50. D’autant que les études montrent que l’équilibre vie privée / vie professionnelle est bien meilleure chez les ingénieurs, si l’on compare aux cadres commerciaux.

    Interview réalisé le 18 juillet 2012 par Gilbert Azoulay

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