Pré-rentrée : les stages de révisions ne connaissent pas la crise

Malgré un coût élevé, les stages de prérentrée ne connaissent pas la crise. Les inscriptions ont fait un bond de 10% cette année.

Pré-rentrée : les stages de révisions ne connaissent pas la crise

    Malgré un coût élevé, les stages de prérentrée ne connaissent pas la crise. Les inscriptions ont fait un bond de 10% cette année.

    La grasse matinée n’est déjà plus leur lot, puisqu’ils ont déjà rejoint des salles de classe depuis lundi, ou s’y replongeront la semaine prochaine. Maths, français ou les deux, physique-chimie, anglais ou méthodologie ? Leurs parents ont choisi pour et parfois avec eux. Dix jours avant que le glas des vacances n’ait officiellement sonné, des milliers de collégiens, lycéens et même des écoliers de primaire s’y collent entre deux et quatre heures par jour. En matinée, avec un prof presque uniquement pour eux puisque les entreprises privées qui proposent ce type de stages assurent des classes de 5 à 8 élèves au maximum.

    Et les multiplient ! A cette rentrée encore, malgré la crise et un coût de plusieurs centaines d’euros le stage, que tout le monde ne peut pas se permettre, chez Acadomia, Complétude ou Legendre, les inscriptions ont fait un bond, entre 10 et 15% selon l’enseigne, jusqu’à 30% chez Legendre dans la seule capitale. A ce stade, ce n’est plus une mode, mais un vrai phénomène. L’instauration de stages de fin d’été au sein même de l’Education nationale n’a rien changé comme ces remises à niveau pour les CM 1 « volontaires », de Charenton (Val-de-Marne) qui ont reçu la visite de leur ministre hier.

    « Je dois refaire mon retard pour réussir mon année »

    Des élèves foulent d'ores et déjà les pavés de la cour intérieure du lycée Saint-Jean-de-Passy, à Paris (XVI e arrondissement), et pourtant la rentrée n'est pas programmée avant début septembre. Ce ne sont d'ailleurs pas des jeunes de l'établissement, mais ceux qui sont inscrits aux stages de prérentrée du cours Legendre, un des leaders du soutien scolaire privé en France. But de ces dix-huit heures de formation dispensées sur neuf jours (payées 455 €) : renforcer leur niveau dans différentes matières. En mathématiques, français ou anglais, comme Mégane, Cyprien et Vincent, hier matin. Dans une petite salle, ils sont tous trois attablés, yeux grands ouverts et oreilles au garde-à-vous, prêts à combler leurs lacunes dans la langue de Shakespeare. Face à eux, un professeur de Seine-et-Marne, ravie de se remettre dans le bain elle aussi.

    « Mon plus gros problème c’était la conjugaison, le prétérit ou le plus que parfait »

    , glisse Vincent, 17 ans. Il est sur le point d’entrer au lycée, comme ses deux autres camarades, et ces cours d’été d’anglais lui permettent d’aborder plus sereinement sa 2de.

    Mégane, quant à elle, avoue aisément qu’elle n’était pas vraiment attentive en 3e : « J’y arrivais pas, j’en n’avais pas envie. » Son challenge est de taille en cette rentrée : après une année de bac professionnel en hôtellerie, elle a décidé de se réorienter. « Je sais que je dois refaire mon retard pour réussir mon année, raconte la jeune fille de 16 ans. Alors, je me suis renseignée, j’ai cherché sur Internet et j’ai trouvé ces cours-là, où je pouvais m’inscrire avant de reprendre les cours. » Elle assure que ses parents n’y « sont pour rien » si elle est ici. Vincent et Cyprien ont eux été davantage poussés par leur famille, même si les deux garçons reconnaissent aisément le bénéfice apporté par l’atmosphère studieuse qui règne ici. « On retient mieux ce qu’on apprend, je trouve », ajoute Vincent en réajustant ses lunettes. Et de préciser : « on n’est que trois, alors c’est plus simple de poser des questions, de dire qu’on n’a pas compris… »

    stage pre rentree
    stage pre rentree

    Visiblement pas frustrés de se priver de leurs derniers moments de vacances, les trois jeunes ne voient pas les deux heures filer. « On n’a pas vraiment l’impression d’être en cours, lance Mégane. Ce n’est pas une ambiance de classe. » « C’est un plaisir de travailler dans ces conditions, s’enthousiasme de son côté Muriel Bailleul, leur professeur. Je n’ai pas à faire le gendarme, ils sont attentifs et, du coup, on progresse plus rapidement qu’avec une classe complète. »

    Ces stages sont-ils vraiment utiles ?

    Le sujet prête autant à discussion que l’utilité ou non des devoirs et cahiers de vacances. Remise à niveau ou mise en confiance avant la rentrée, pour les entreprises qui proposent ces stages, la question ne fait évidemment pas débat : « C’est là que parents et enfants éprouvent le plus le besoin d’une remise en jambes, après deux mois de vacances », explique Olivier Gresse, responsable des études aux cours Legendre. « Cette remise dans le bain permet de ne pas rater son premier trimestre, le plus important », estime le patron d’Acadomia, poids lourd du secteur du soutien privé.

    Pour les parents

    Ces stages sont utiles, si l’on en juge par le nombre croissant de ceux qui en font la demande… A condition de pouvoir se permettre la dépense. Outre qu’ils écourtent de longs congés d’été quand les adultes reprennent le travail, en remettant les enfants dans le rythme « études et concentration », ces stages « répondent à leur angoisse » d’un échec scolaire pour les enfants, analyse la psychopédagogue Brigitte Prot. « Cela calme leur culpabilité de n’être pas assez là pendant l’année ; ils ont l’impression d’avoir fait ce qu’il faut. »

    Pour les résultats

    Ça dépend. Difficile de juger de ce qui aurait été, si tel élève n'avait pas écourté ses vacances pour reprendre des cours avant les cours. « La meilleure preuve que cela sert, c'est quand une collégienne revient, alors qu'elle était inscrite par sa mère et contre son gré l'année précédente. Et qu'elle nous dit qu'elle a ainsi pu démarrer l'année en ayant plus confiance en elle », explique-t-on chez Complétude. Pour Brigitte Prot, plutôt sceptique, « les stages de dix heures de révision dans une matière, vendues comme un rattrapage » avant la rentrée frôlent « la malhonnêteté pédagogique ». Les stages de méthodologie, ou comment apprendre à apprendre, « peuvent se révéler plus intéressants ». A condition qu'il y ait eu un vrai diagnostic : « On ne propose pas un groupe mêlant des 3es et des 2des, c'est une aberration ». Que cela corresponde à un besoin réel de l'enfant, « et pas pour faire plaisir à ses parents », alors il sera réceptif. Et si ses progrès sont vraiment évalués en fin de stage, alors seulement il y gagnera « le sentiment d'être davantage pilote de son avion après la rentrée ».

    Pour les élèves

    Pas tous… « Bien sûr, le travail intellectuel est une gymnastique, et il n’est jamais inutile de s’exercer, mais on peut le faire différemment », juge le proviseur Philippe Tournier, très sévère contre ces stages qu’il juge inutiles : « Un système scolaire qui fonctionne normalement, et pas de façon si compétitive, n’a pas besoin de ce type de stages. » Une éducation parallèle, dont le rapport remis à la commission européenne relevait qu’elle est inégalitaire car tous les enfants ne peuvent y avoir accès. Dans l’une de ces entreprises privées, on reconnaît que les inscrits ne sont pas non plus des enfants en difficulté scolaire.

    Claudine Proust

    Article publié dans le Parisien / Aujourd'hui en France du Vendredi 26 août 2011

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